Promenade sous les arbres [PV Gabrielle]

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Ah, qu'il y avait des arbres différents dans cette forêt qui semblait sans fin. Il était drôle de voir que c'était dans ce coin là que Ryugi s'était installé il y a quelques années. Ryugi se souvenait de ces arbres, car tout arbre avait son identité, sa nature, son âge, ses signes particuliers, et Ryugi les connaissait tous. Il avait appris à leur parler. Après tout, ce n'est pas bien compliqué, surtout quand on est un elfe, dont la famille s'était occupée depuis des générations à veiller sur les forêts et les arbres, Ryugi avait appris bien des choses dessus. Car même s'ils ne répondaient pas, Ryugi savait qu'ils étaient là, qu'ils entendaient ce qu'on leur disait, qu'ils pouvaient aussi bien déprimer que de pousser seul, fièrement, se dressant devant ses confrères connifères, et notre nouveau professeur pouvait lire tout cela rien qu'en posant la main sur l'écorce d'un de ces arbres. Et c'était ainsi que Ryugi regardait ces feuilles rougeâtres qui volaient au gré du vent frais qui passait par là. Un vent que Ryugi avait senti, se dirigeant vers l'école. C'était ainsi que Ryugi levait ses bras, et se laissait balloter par le vent, qui le conduisait un peu n'importe où, une petite danse ridicule et invisible mais que le vent portait. Chaque moindre petit coup de vent soulevait les mains de Ryugi, et donc, c'était une sorte de danse où Ryugi n'avait que comme partenaire ce vent qui le manipulait comme une marionette. Non pas qu'il se faisait manipuler, mais plutot, qu'il se laissait manipuler. Rien n'était mieux pour connaître le ciel et l'humeur des vents que de se laisser porter par l'un d'entre eux.

Pourtant, en étudiant le vent de cette façon, il y avait un petit quelque chose que Ryugi ne comprenait pas. L'air était un ensemble, comme une couche qui recouvrait tout, et dont les creux représentait une forme, souvent celles des arbres. Mais là, il y avait un creux supplémentaire et mobile, dont la forme était plutot humanoïde. Une forme qui s'approchait, bien qu'étant encore assez loin, trop loin pour pouvoir être vue de ces yeux, c'est pourquoi Ryugi arrêta de danser tout seul avant de se poser contre un arbre, de fermer les yeux et de se concentrer. Et c'est là, bien concentré sur cette zone, que Ryugi avait vu qu'il s'agissait d'une demoiselle. Ou alors d'un mec avec de superbes courbes féminines. Mais bon, la première réponse était plutot la bonne, car Ryugi voyait, ou plutot sentait, que le vent qui la touchait gentiment s'arrêtait et était repoussé par de jolis traits, et se concentrant plus encore, il voyait que le visage était non seulement féminin, mais aussi bien joli. C'était rare de voir quelqu'un dans cette forêt. Et apparemment, c'était un professeur. Trop grande pour être une élève. Ce n'était pas la démarche d'une adolescente. Ryugi savait tout cela rien qu'en étudiant le vent qui soufflait dans cette forêt, qu'une prof (ou bien une employée) s'approchait peu à peu derrière lui. Et lorsqu'elle fut suffisamment proche, Ryugi entonna d'une voix chantonnante.

"Bonjour mademoiselle. Ou plutot devrais-je dire madame?"

Avec un grand sourire, Ryugi se retourna et s'agenouilla, pour adresser à cette demoiselle un baise-main. Coutume d'Espéranto.

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Un air frais. Une douce mélancolie. Un vent accueillant. Un frisson qui parcourt de long en large le dos. Un arrêt dans le temps. Une pause. Un stop. Une fin ainsi qu'un début, tous deux éternels. A jamais. Un bruit silencieux. Un souffle infiniment petit par rapport à l'infinité de l'infini. Un corps invisible. Une âme en peine. Un réconfort introuvable. Une rage disparue. Une douceur. Une questions sans la moindre réponse.
Puis des contraires.

A son arrivée ici, Gabrielle avait été légèrement sceptique. Elle qui avait la capacité de figer un être vivant par un simple regard aurait-elle put figer le souvenir d'une forêt en plein automne ? Non, bien sur que non. Elle avait finit par comprendre qu'elle n'y était pour rien. Alors pourquoi éprouvait-elle toujours un sentiment de culpabilité en cet endroit si étrange ? Et notre jolie et jeune professeur n'arrivait jamais à s'en débarrasser. C'était aussi impossible que de ne pas se mouiller en pleine mer.
Ainsi Gabrielle avançait doucement entre les arbres qui perdaient éternellement leurs feuilles oranges et marron. Elle laissait pleinement l'air entrer dans ses poumons. Notre chère amie se réjouissait de cette idée qu'elle avait eue de se balader ainsi vers le Bosquet d'Automne. Elle n'était pas bien couverte, comme à son habitude. Un simple bustier donnant une vue panoramique sur sa poitrine couvrait le haut de son corps, et une espèce de short cachait le haut de ses longues jambettes. Pour simples chaussures des ballerines blanches. D'ailleurs, aujourd'hui, elle avait décidé de porter des habits clairs, pour bien se démarquer du paysage doré du Bosquet d'Automne.
Le vent lui rabattu une mèche de cheveux sur le visage. Gaby s'empara de l'élastique noir qu'elle avait autour de son poignet fin et avec une grâce infime, elle noua sa belle chevelure rosée et soyeuse. Elle ferma les yeux. Elle aimait sentir ce petit air frais venir caresser son visage.

[i]C'était un petit plaisir insoupçonné qui éveillait en elle une joie immense.
Soudain, son odorat se mis en éveil. Le vent lui apportait une odeur aussi étrangère que familière. Elle 'questionna' brièvement l'élément. Cette senteur suave persistait. En plus de ça, elle n'était pas immobile. Elle bougeait. Gabrielle ouvrit les yeux. Elle continua d'avancer, à la recherche de cette odeur particulière. Le vent ne mentait jamais. Jamais. Il y avait bien quelqu'un d'autre dans le Bosquet d'Automne. Une fois lancée, Gaby ne pouvait d'arrêter. Sa curiosité remontait à sa plus tendre enfance. Petite, elle ne pouvait s'empêcher de poser des questions, indiscrètes ou non, étranges ou logiques. Aujourd'hui, elle gardait bien sa langue dans sa poche, mais ne pouvait empêcher les interrogations d'envahir son esprit calme. Disons que c'était sa . . . nature.
Elle écrasa plusieurs branches mortes par inadvertance, mais continuait bel et bien à chercher cet inconnu dont le vent lui avait envoyé l'odeur.
C'en était presque amusant. Jamais elle n'aurai cru en venant ici rencontrer quelqu'un d'autre.
Un son parvint à ses oreilles, elle s'arrêta net.

'' Bonjour mademoiselle. Ou plutôt devrais-je dire madame?''

A peine eu-t-elle le temps de comprendre d'où venait cette voix, qu'un homme d'assez grande taille s'empara délicatement de sa main, et s'agenouilla devant elle. Son cœur cessa littéralement de battre, ou du moins, il eu un raté fortement prononcé. Sa seconde main se porta automatiquement à sa bouche, mais l'expression de son visage ne changea pas : toujours indéchiffrable. Elle considéra l'inconnu d'un coup d'œil. Ses cheveux d'un noir de jais étaient en bataille. Un bandeau couvrait la moitié de son visage. A nouveau son cœur fit des siennes. Cet homme lui rappelait de trop Nykola, don frère adoptif qu'elle haïssait tant, celui qui avait perdu un œil dans une stupide 'baston' contre … Elle chassa ces souvenirs de sa tête et sa salive glissa le long de sa gorge sèche.

''Mademoiselle suffit amplement. A qui ai-je l'honneur ? Peut être serait-il plus poli que je me présente en première. Gabrielle Nivis Christmas. Professeur à Verto.'

Son regard doux accompagnait ses paroles, mais elle gardait une expression de marbre.

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Il y avait une chose de drôle qui vint lui effleurer l'esprit. Lorsque Ryugi lui avait fait un simple-baise-main, elle était restée plutot de marbre, avec un visage impassible. Il n'y avait eu qu'une réaction simple, une main portée à sa bouche, mais Ryugi ne pouvait pas vraiment dire ce que ce geste signifiait. Cela pouvait être un geste de recul, un réflexe de protection, ou bien alors une main posée sur la bouche afin de dissimuler un sourire, un étonnement, une bouffée de colère, tant de choses étranges et différentes qui pouvaient bien la saisir et dont Ryugi n'arrivait pas à déchiffrer le sens. Mais ce qui était vraiment drôle n'était pas qu'il ne comprenait pas ce geste, mais... Qu'on ne le connaissait pas, qu'on ne le nommait pas, qu'elle ne le connaissait pas, qu'elle n'avait jamais vu sa tête, et qu'elle en était indifférente ou presque. Cela changeait de sa terre natale, et donc, c'est pourquoi Ryugi avait ce petit sourire. Il était heureux que l'on ne le conanisse pas, non mieux. Il était heureux d'être enfin pris pour lui même et non pas pour un autre personnage folklorique. Une joie qui se lisait sur son visage. Peut être que les deux personnes en présence étaient radicalement différents. L'indifférence face à la joie de vivre... Et en plus, cette demoiselle s'était présentée. Enfin quelqu'un qu'il connaissait et dont il pourrait se présenter sous son nom. Mais le mieux était que cette personne était professeur... A Verto elle aussi. Rien ne pouvait mieux le ravir. Mais il fallait que lui aussi se présente.

"Ravi de vous rencontrer Gabrielle. Mon nom est Ryugi Silver. Et je suis aussi professeur, à Verto également."

En y réfléchissant bien, Ryugi se demandait ce qu'elle faisait là. La forêt était bien trop large pour que cette rencontre soit purement fortuite, et Ryugi n'avait rien fait pour aller à sa rencontre. C'est elle qui est venue en ligne droite vers Ryugi, surement pour savoir ce que c'était. Cela voulait dire que ce n'était pas une rencontre hasardeuse, non, qu'elle avait des pouvoirs bien précis. Après tout, elle était prof à Verto, donc, peut être que leur élément était le même? Après tout... Le vent semblait bien lui avoir dit qu'il lui amenait quelqu'un... Donc, cela voudrait dire qu'ils seraient tous les deux du vent? Peut être, une supposition pure. Mais en tout cas, cela faisait des cours assez animés, et s'ils s'entendaient bien, cela pourrait peut être devenir de grandes choses. Où Ryugi pourrait combler ses points faibles... Car il n'avait pas d'expérience, il n'avait jamais enseigné, non, pardon, il n'avait jamais été dans une classe. Et il n'avait jamais su ce qu'un professeur pourrait enseigner... Mais Ryugi avait juste de quoi enseigner : Il lui suffisait de leur apprendre ce qu'il avait appris tout seul... Mais Ryugi était quand même inquiet, et c'était pour cela qu'il était parti se calmer et s'isoler dans cette forêt automniale où il avait ses repères...

"J'espère que nous pourrons bien nous entendre. Après tout, vous êtes la première collègue que je rencontre, et je suis encore débutant... C'est comment, le contact avec les élèves? "

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Gabrielle n'arrivait pas à vraiment le regarder. Son bandeau sur le visage lui pinçait le cœur. Elle ne cessait de penser à Nykola. Mais elle prit sur elle. Évidemment, elle ne planta pas son regard dans celui de l'inconnu. Gaby avait apprit au fil du temps à ne pas fixer les gens dans les yeux. Ses origines de Gorgone le lui en empêchaient formellement. Dès que son interlocuteur avait le malheur de se plonger dans ses yeux naturellement violets, il se voyait changé en pierre.
Après avec connu deux ou trois mésaventures à cause de ce pouvoir héréditaire, Gabrielle avait saisit que la personne qui se voyait changée en roc souffrait énormément lors de la transformation. Et jusqu'à preuves du contraire, la jeune professeur n'était pas une sadique qui cherchait la souffrance chez les autres. Elle avait bien trop souffert elle-même pour infliger ce supplice aux autres.
Gaby leva doucement le menton, et laissa retomber gracieusement sa main qu'elle avait porté précédemment à sa bouche. Elle observa à nouveau l'inconnu aux manières étranges. A tout bien réfléchir, il était plutôt bel homme, et sa musculature semblait abondante. Un professeur ?
Certainement. Gabrielle retira sa main aussi doucement qu'elle avait été saisit, pour remettre une mèche de cheveux roses derrière son oreille.

Ryugi Silver. Ce nom ne lui disait rien. Apparemment, cet homme était un nouveau professeur, à Verto. Que de surprises aujourd'hui ! Gaby tira sur son élastique et ses cheveux tombèrent en cascade sur ses épaules frêles. D'une main hasardeuse, elle les remit bien en place. Le vent ne se faisait plus sentir.
Elle inclina brièvement la tête en signe de salut. Ryugi, son nouveau collègue semblait être un homme bon et fort agréable. Pas un de ces enquiquineurs de première qui ne cessaient de vous embêter sur les moindres détails. De plus, sa voix laissait entendre qu'il était bon professeur. Oui, Gaby aimait juger les gens par le son qu'émettaient leurs cordes vocales. Et en l'occurrence, Ryugi promettait d'être un bon collègue
S'il était de Verto, quel élément contrôlait-il ? De son côté, Gabrielle arrivait à communiquer avec le Vent, mais entièrement à se faire respecter. Son véritable allié était sans hésiter l'Eau. Pour elle, il s'agissait de loin du plus fort élément, le plus puissant. Celui qui était partout, celui qui pouvait se déformer, celui qui était un excellent porteur de son. L'Eau, tout simplement.
Gaby s'apprêtait à poser cette question qu'elle ne jugea en rien indiscrète, mais Ryugi ouvrit la bouche avant elle :

"J'espère que nous pourrons bien nous entendre. Après tout, vous êtes la première collègue que je rencontre, et je suis encore débutant... C'est comment, le contact avec les élèves? "

Gabrielle inclina légèrement la tête. Non, ce n'était pas un signe d'incompréhension, juste un petit geste purement féminin.
Elle réfléchit rapidement à la question. Le contact avec les élèves ? Oh, certes, on voyait bien en Ryugi le côté 'nouveau'. Un professeur n'ayant jamais enseigné. Gaby sourit à cette idée. Elle aurait la joie de lui apprendre les ficelles du métier. Son sourire disparut. Elle passa sa main dans ses cheveux, et s'appuya sur sa hanche.

« Eh bien, tout dépend des élèves. Habituellement, nous n'avons pas affaire à des débiles mentaux. Je ne dis pas qu'il n'y a pas deux ou trois petits perturbateurs, mais généralement, si vous arrivez à capter leur attention, vous pouvez leur offrir un cour tout à fait intéressant. Je vous conseille d'essayer de vous faire respecter dès le début. Personnellement, cela fait ma seconde année en temps que professeur ici, et je n'ai jamais eu de problèmes réels de disciplines avec mes élèves. »

Gabrielle lui offrit à nouveau un léger sourire qui s'effaça faiblement. Son regard survolait le visage de Ryugi. Peut être cela était-il perturbant ?
Sa curiosité fit à nouveau face. Quel élément contrôlait-il déjà ? Oh, oui, elle ne lui avait pas posé la question.

« Dîtes-moi, Ryugi, quel élément est votre allié ? »

La tournure de sa phrase lui plaisait bien. Un élément n'était jamais sous le contrôle de quelqu'un. Il pouvait lui parler, l'aider, le respecter, s'en faire un allié, mais jamais le contrôler.

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Sans vraiment le savoir, Ryugi courait un gros danger. Car en effet, il trouvait cela étrange que lors de cette petite conversation, bien qu'il ait essayé de chercher les yeux de son interlocutrice, Ryugi n'avait pas réussi à capter son regard, à pouvoir pleinement voir dans le fond de ses yeux. Non, ce n'était pas une marque d'irrespect. Notre jeune professeur le sentait, ce n'était pas de l'irrespect mais peut être de la peur, que quelque chose soit lu dans ses yeux derrière ce masque d'indifférence, comme un secret qu'elle essayait de cacher. Enfin, c'était la théorie la plus probable, car il ne pouvait pas savoir ce qui se passait quand il la regarderait fixement. Peut être que cela la gênait d'essayer de capter son regard, alors Ryugi n'insistait pas, même si la curiosité montait assez rapidement en lui. Il serait impoli d'insister, cela pourrait finir par l'énerver et ce n'était surtout pas ce que Ryugi voulait. Donc, notre elfe se contenta d'attendre une simple réponse, qui ne tarda pas à venir. Et cela le rassurait un peu. Ce n'était pas tous des monstres, donc, rien qui ne donne matière à déprimer. Non, plutôt, Ryugi pensait qu'il allait s'amuser. A embêter les élèves. Mais bon, tout dépend des élèves qu'il aura, comme elle dit. Et Ryugi était désormais impatient de connaître les élèves dont il aura la charge. En espérant qu'ils changeront pas de groupe après le premier cours. Alors, c'était à son tour de poser une question, de quel élément était-il l'allié. Drôle de façon de poser cette question... Mais après tout, il était vrai que l'on ne contrôlait pas les éléments.

"Je n'avais pas pensé à dire que c'était un allié... C'est vrai que ce terme convient mieux que celui d'ami, comme j'aime à l'utiliser. Mais pour moi, l'air est mon ami, mon meilleur confident, dispersant aux quatre vents mes pensées obscures et m'accompagnant dans toutes mes tâches. L'air, qui selon moi est le meilleur des éléments, car peut être le plus léger et le plus docile. Mais si le vent est pour moi un ami, je dirai en effet que la terre est mon alliée. Avec elle, je dois me faire respecter, être un peu plus dur avec elle..."

Ryugi souriait. Il ne put s'empêcher d'allier une démonstration à son geste, murmurant au vent de le transporter. Alors, doucement, Ryugi sembla s'évaporer tandis qu'il parlait, comme s'il devenait lui même du vent. Le vent était son ami, il savait l'écouter. Ryugi s'entendait très bien avec le vent, et résultat, le professeur s'était fondu avec lui. Avant de réapparaître derrière sa collègue. Puis, levant une main, une petite tige sortit du sol, avant de grandir, de bifurquer, de se ramifier. Pour donner presque un petit arbre vert composé uniquement de petites tiges vertes et toutes fines. Et au bout de chacune des tiges, une fleur d'une couleur différente poussa, dans l'ordre des couleurs de l'arc en ciel. Des fleurs aux formes variées, mais avec un parfum unique et simple, doux et calme. Non pas que Ryugi était incapable de créer plusieurs parfums à la fois, mais trop de senteurs différentes rendaient l'odorat confus. Et Ryugi avait la flemme de composer une symphonie de parfums. Ensuite, les fleurs se regroupèrent et la tige centrale disparut, comme effacée par une gomme invisible. Ryugi maintenait ces fleurs en lévitations avant de les prendre toutes dans sa main, les tenant toutes ensembles. Un anneau de pierre se forma alors à l'endroit où il tenait ses fleurs, afin de les regrouper ensemble sans qu'il n'ait besoin de les tenir encore. Afin de pouvoir tendre le bouquet tout entier à sa collègue.

"... Mais quand elle veut, la terre fait de très jolies choses, une diversité de couleurs qu'aucun autre élément ne peut produire."

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La jeune femme aimait beaucoup son nouveau collègue. Car il y a des fois où le premier contacte est le bon. En l'occurrence, Gaby avait directement accroché avec Ryugi. En plus d'être beau, grand et fort, il était intéressant, sympathique et impressionnant. Le genre de personnes dont la professeur aimait la compagnie.
Malgré la sympathie qu'elle éprouvait pour l'homme, elle ne montrait en rien une expression heureuse ou expressive. Au contraire. Toujours le visage sculpté dans le marbre, Gaby n'offrait généralement que très peu de sourires.
Elle avait entièrement conscience que le fait que son regard ne soit pas dans celui de son interlocuteur fut très gênant, voir agaçant. Mais que pouvait-elle y faire ? Elle était un monstre, elle était un monstre. Elle n'y pouvait rien, et elle l'assumait entièrement.
Ryugi sembla quelque peu surpris de l'emploi du terme 'allié'. Oui, peut-être cela était-il faible comme mot. Mais Gabrielle avait un tel respect pour les Elements qu'elle n'osait pas employer 'ami' pour les désigner. Mais son collègue avait raison. L'Eau était plus son ami que son allié.
Gaby adorait quand les réponses à ses questions lui permettaient de voir les choses sous un autre angle.
Le Vent et la Terre. Deux éléments forts intéressant. Gabrielle avait longtemps chérit la Terre, mais n'avait jamais réussi à se faire respecter par cet élément. Elle regrettait aujourd'hui de ne pas avoir persévéré pour obtenir sa confiance. Le Vent était un allié considérable et puissant. Ryugi savait très bien le décrire. '' Peut être le plus léger et le plus docile ''. Oui, le plus léger.

Ryugi accompagna ses paroles par une démonstration très impressionnante. Il se fondit dans le Vent, s'incrusta dedans, et ne devint qu'une forme abstraite. Il réapparut derrière Gaby. Celle-ci se retourna, légèrement amusée. Elle regarda faire son collègue qui avait plutôt l'air à l'aise avec ses deux éléments. La professeur s'attendait à un nouveau tour avec le vent. Au lieu de cela, Ryugi, d'un simple geste de la main fit pousser un petit arbuste. A l'extrémité de chacune de ses branches fines se dressait une fleur. Au total, il y en avait sept. Une pour chaque couleur de l'arc-en-ciel. Cet ensemble magnifique réussi à décrocher un petit sourire sur le visage de la jeune femme.
Ryugi les lui tendit. Elle s'en empara avec douceur. Le parfum était frais et agréable.
Gaby était impressionnée par ce magnifique tour que venait de faire son nouveau collègue.

« On peut dire que vous savez contrôler vos éléments ! Et je vous remercie pour les fleurs, elles sont splendides. Je suis aussi proche du Vent que vous l'êtes pour la Terre. Mais mon véritable … ami, comme vous dîtes, est sans nuls doutes l'Eau. Quoi de plus gracieux ? Quoi de plus doux que d'effleurer du bout du doigt une marre ? Quoi de plus agréable que de regarder une onde se perdre dans l'infinité de l'Eau »

Des questions dont elle connaissait la réponse : Rien.

« L'Eau est dans chaque chose. Pour commencer, elle est dans l'Air. Peut-être est-ce pour cela que je me suis associée avec le Vent. »

Gaby s'interrogea : devait-elle ou non prouver ses dires ? A quoi cela servait-il d'accentuer ses précédentes paroles ? Mais voilà qu'elle remarqua à nouveau que Ryugi cherchait son regard. Elle ne voulait certainement pas lui dire révéler sa 'race', ses origines. Elle l'avait caché pendant ses nombreuses années ici, ce n'était pas maintenant qu'elle le révèlerait, surtout à une simple connaissance. Une petite idée lui traversa l'esprit. Une idée avantageuse.
Gabrielle interrogea tout d'abord le Vent. L'air contenait assez d'humidité pour faire ce qu'elle souhaitait réaliser. Sans la moindre difficulté, elle arrivait à percevoir les gouttes d'eau qui flottaient dans l'air. Ces dernières s'approchèrent doucement d'elle. Toute personne n'était pas amie avec l'Eau ne pouvait voir ces milliers de gouttelettes.
Elles fondirent sur la jeune femme, la recouvrant entièrement. Puis, avec une rapidité incroyable, elles entrèrent complètement dans son corps. Gaby ne faisait plus qu'un avec l'Elément.
On aurait dit une statue aquatique à son image. Ses traits étaient à peu près les mêmes. On ne pouvait cependant pas distinguer ses vêtements : quand elle effectuait ce genre de démonstration, on pouvait la croire nue.
L'Eau était bien plus fort que le pouvoir de la Gorgone. Ainsi, Gabrielle Nivis planta son regard dans celui de Ryugi. Elle lui offrit un petit sourire peu visible à cause de son apparence. Ce qui lui plaisait toujours beaucoup, c'est qu'on pouvait voir à travers elle. Mais le meilleur était sans doute qu'elle avait la capacité de bouger ses cheveux. En effet, on voyait sa chevelure danser, comme si elle se trouvait sous l'Eau.
Gabrielle profita pleinement de pouvoir balader ses yeux dans ceux de son collègue. C'était quelque chose qu'elle n'avait pas toujours l'occasion de faire.
Gaby se dit qu'il était temps de mettre fin à sa petite démonstration. Elle souleva une rafale de Vent. L'Air s'agita. Comme si elle s'évaporait, de la fumée sortait de la jeune femme. Au bout de deux petites secondes, il ne restait plus une goutte d'eau, et la professeur était redevenue normale. Elle n'était même pas mouillée.

« Se fondre avec son Elément est la meilleure chose que l'on puisse faire. N'êtes-vous pas d'accord ? »

Gaby se passa la main dans les cheveux et s'appuya sur sa hanche droite.

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Le premier contact semblait être très bien passé dans les deux sens. Les deux personnes semblaient en accord, et s'entendaient très bien. En effet, Ryugi avait remarqué qu'elle semblait vouloir cacher ses sentiments par une inexpressivité faciale, et pourtant, lorsque Ryugi lui avait offert ces jolies fleurs, elle lui avait adressé un sourire un peu plus remarqué. Cependant... Malgré ce fait, elle semblait toujours ne pas vouloir lui adresser un regard. Pourquoi? Ryugi sentait que si notre elfe la regardait dans les yeux, il pourrait y avoir quelque chose de terrible. Quelque chose de très grave, qui pourrait être très dangereux, ou plutot un secret qui pourrait peut être lui porter vraiment préjudice... Peut être qu'il était préférable d'attendre qu'ils se connaissent un peu plus. Mais au moins, elle lui avait adressé un sourire, ce qui suffisait amplement à le rendre heureux pour l'instant. Mais après la joie que Ryugi avait ressenti, l'envie avait pris place dans son esprit. l'envie de savoir. L'envie de savoir ce dont elle était capable, la curiosité qui le rongeait. La curiosité de savoir ce qu'un professeur expérimenté pouvait faire, d'autant plus que personne ne lui avait jamais montré ses capacités magiques. Après tout, il n'a jamais été à cette université en temps qu'élève, donc, Ryugi ne pouvait pas savoir ce dont les autres étaient capables. Et surtout que cette prof avait l'air sacrément douée et expérimentée... Alors, Ryugi sentit un léger mouvement de l'air. Une chose d'inexpliquée. Comme une dépression avec un centre assez difficile à cerner, sans pour autant sentir quoi que ce soit de vraiment particulier. C'était étrange, Ryugi ne savait pas quelle était l'origine ni les conséquences de cet acte. Peut être était-ce elle?

Et c'est en reposant les yeux sur sa charmante interlocutrice que Ryugi comprit. L'eau de l'air s'était fondue sur elle, et peu à peu, c'était elle qui devenait cette eau. Et elle était vraiment magnifique. Car en effet, Gabrielle était formée uniquement d'eau. Et non seulement Ryugi voyait qu'elle avait de jolies formes (de très jolies formes), mais en plus, elle semblait en perpétuel mouvement. Sans compter qu'elle était presque transparente. Un effet visuel magnifique... Mais ce qui comptait le plus c'était qu'enfin, elle le regardait dans les yeux. Et c'était quelque chose de rare, la première fois que cela arrivait. Ryugi profita au maximum de ce moment. Même si ce n'était pas ses vrais yeux et que Ryugi voyait à travers elle, c'était presque comme si pour une fois, les deux regards étaient plongés l'un dans l'autre. Ce qui ravissait enfin notre professeur, encore plus heureux qu'avant. Mais ce ne fut que de courte durée. Elle reprit son apparence normale, et détourna son regard. Dommage... Ryugi voulait encore partager son regard, et même avoir un vrai échange de regard... Mais mine de rien, Ryugi avait beau dire, il la trouvait quand même jolie.

"Cela dépend, tout dépend de l'élément... Si se fondre dans l'air donne une sensation incoparable... Se fondre dans la terre est particulièrement..."

Ryugi soupira et se concentra. Avant de murmurer un peu au sol qui était sous ses pieds. Très rapidement, notre elfe s'était changé. Il avait pris quelques couleurs grises, avant que ce mouvement gris ne se propage. Ryugi se fossilisait peu à peu, devenant pur granite. Mais l'expression de son visage ne put être contrôlée... Affichant une expression de douleur qui essayait en vain de ne pas être affichée... Mais Ryugi était devenue une vraie statue en bonne et due forme, dure et impossible à bouger. Mais la transformation lui avait fait mal... Et la détransformation allait lui refaire le même mal. Peu à peu, la statue reprit ses couleurs et Ryugi tomba à terre, à quatre pattes, en sueur et en respirant fort. Cela avait fait sacrément mal, mais la transformation en pierre avait toujours cet inconvénient de changer la structure cellulaire... Cela faisait donc obligatoirement mal.

"... Douloureux. Très douloureux. Mais bon, avec l'entrainement, je vais bien finir par m'y accomoder rapidement..."

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Gabrielle regrettait de ne pas être restée plus longtemps fondue avec l'élément Eau, car elle aurait souhaité prolonger sa balade du regard. Les yeux de Ryugi était agréable à contempler. Peut être était-ce dû au fait qu'elle n'avait pas l'habitude d'observer les pupilles de ses interlocuteurs. Peut être. Peut être pas. Question à laquelle elle ne trouva pas de réponse. Elle se la reposerait plus tard, la tête posée, au calme.
Elle se rendit bien vite compte que Ryugi voulait à nouveau tenter l'expérience, la regarder dans les yeux. Ne sentait-il pas le danger ? Ses sens ne le prévenaient-ils pas ? N'avait-il pas … conscience ? Non, évidemment. Il ne savait pas cela. Il ne savait rien sur Gabrielle. Et pourtant, son regard se montrait insistant. Heureusement, il ne disait rien. La lutte se faisait en silence.
Et une seconde fois, HEUREUSEMENT, il prit la parole pour rompre la manque de paroles. Certes. Se fondre dans la Terre, Gaby n'avait jamais essayé, et savait pertinemment qu'elle ne le ferait jamais. Elle ne niait pas que cet élément l'avait longtemps fasciné, et qu'elle gardait un fond de jalousie quand elle rencontrait quelqu'un qui le contrôlait à la perfection. Mais en temps que professeur, jamais elle n'avouerait qu'elle avait baissé les bras lorsqu'elle avait essayé de se lier avec la Terre.

Gabrielle Nivis montra pour la première fois depuis cette rencontre hasardeuse un semblant de comportement 'humain'. Elle fronça les sourcils. Faiblement, certes, pas elle le fit quand même. Son regard traversa brièvement celui de Ryugi. C'était la cause de ce léger plissement du front. Etait-ce une erreur ? L'avait-elle fixé assez longtemps pour qu'il soit changé en une statut de pierre ? La réponse était presque évidente : non.
Gaby allait bientôt se détendre. Mais quelque chose d'inattendu, non, de très inattendu se produisit. La peau blanche de son nouveau collègue devint peu à peu grise. La couleur maudite se propageait plutôt rapidement sur son corps. Son visage affichait une expression intense de douleur.

« Ryugi ! »

Celui-ci était devenu un simple statue de pierre. Le cœur de Gabrielle bondit. Il resta même coincer dans sa gorge. Ne pas perdre son sang-froid ! Ne SURTOUT pas le perde ! Mais mer... mince ! Elle venait de changer cet homme en pierre ! Sa respiration se faisait rapide. Le nouveau professeur de Verto souffrait réellement. Alors que Gabrielle avait les yeux grands ouverts de stupeur, par un miracle … miraculeux, Ryugi se retransforma doucement. Sa peau redevint blanche et perdu tout à fait sa couleur grise. Gaby eu l'impression qu'elle ne s'habituerait JAMAIS à ce pouvoir héréditaire. L'homme tomba à terre, haletant. Tout son corps semblait transpirer. Gabrielle se mis directement à ses côtés. Presque automatiquement, grâce à son talent, les gouttes de sueurs de Ryugi volèrent dans l'Air, et vinrent former une sphère parfait dans la main de la professeur. Gaby demanda à l'Eau de se débarrasser de toute ses impuretés. Doucement, la jeune femme passa cette boule sur le visage de son collègue. Cela faisait le même effet que si elle lui avait passé un gant imbibé d'eau froide.

Le cœur de Gabrielle put battre à nouveau quand Ryugi parla une seconde fois. Ce … Il s'était changé en pierre volontairement. Gaby Nivis n'y était pour rien. Rien du tout. C'était juste … la Terre qui lui avait procuré cette douleur. Certainement le changement de la structure cellulaire. Mais … En temps que professeur à Vito, n'était-elle pas censée être au courant ? Que s'était-il passé dans sa tête ? MINCE !
Il fallait se rattraper ! Vite ! Parler, dire quelque chose. Mais surtout, faire en sorte que son secret ignoble ne soit pas découvert.

« Je déteste ce genre de métamorphose. Quand la Terre engendre la douleur, quand les visages se crispent. Mais vous devez avoir raison, avec de l'entraînement, cette transformation ne devrait plus vous affaiblir. »

Comme pour le réconforter -et se réconforter elle-même-, elle lui adressa un joli sourire, qui, pour une fois, ne s'éteignit pas.

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Cela faisait quand même vraiment mal. Ryugi sentait chaque fibre de son épiderme le faire souffrir, comme le faire payer de cette transformation. Comme si une aiguille microscopique venait percer chaque cellule de son corps, ou plutot de son épiderme. Car Ryugi n'avait pas fait une métamorphose totale, mais juste la couche supérieure de la peau, ce qui faisait déja un mal horrible. Toujours à quatre pattes, Ryugi avait senti une sphère aquatique le tenir, le rafraichir un peu. C'était bien, c'était ce qu'il lui fallait. Mais peut être que ce qui lui avait rendu des forces était certainement son sourire. Sauf qu'il y avait quelque chose derrière ce sourire. Sa respiration était plutot irrégulière, comme si elle cherchait à se calmer. Comme si elle s'était affolée. Peut être avait-elle un don d'empathie. Peut être avait-elle senti la douleur de Ryugi, ou bien qu'elle savait que la transformation en pierre était risquée. Mais elle avait comme alliés l'eau et l'air, donc, il était aussi possible qu'elle ne sache pas comment détransformer une personne pétrifiée. Ou plutot qu'elle sache, mais qu'elle ne le puisse tout simplement pas. C'était plutot charmant de s'inquiéter de la sorte. C'est pourquoi Ryugi se releva, serrant les dents, mais rendant autant que possible un sourire. Non, il n'avait plus mal. Il était habitué. Il devait être habitué.

"La terre engendre la douleur... Mais apporte quand même des avantages. Contrairement à l'eau, l'air ou le feu, la terre possède de la résistance, plus de résistance que jamais l'eau ou même la glace ne pourrait avoir. Et puis... J'ai déja eu plusieurs fois des accidents de pétrification, où je me suis retrouvé coincé en pierre. Mais c'est dans ces moments là que j'ai pu réellement me concentrer sur la terre, sans que le vent ne me parle, sans que les sons extérieurs ne viennent me déranger, sans que quoi que ce soit ne puisse me perturber, rien d'autre que la terre. Ca m'est arrivé même souvent. Et maintenant... Bien que la terre n'est pas encore une amie, je peux détransformer. Tous les accidents de pétrification, et ce sans la moindre douleur pour cette détransformation. Cependant... Cela demande trop de concentration quand cela doit être appliqué sur moi même."

Ryugi avait à présent oublié sa douleur... Quand il pensait aux fois précédentes. Il avait déja essayé de pétrifier des animaux qui étaient passés par cette forêt, des animaux mais aussi toute la faune à l'intérieur. Où il put faire toutes sortes d'expérience et même si pour l'instant il n'arrivait pas à pétrifier sans la douleur qui l'accompagne, Ryugi pouvait à présent utiliser les deux facettes de la terre, pierre et plante, pour composer un anti-douleur agissant en même temps que la dépétrification. En utilisant l'air pour véhiculer l'anti-douleur dans chaque parcelle qui pourrait avoir mal. Sauf que cela requierrait trop de force de pensée, et que l'air et la terre tous deux soient avec lui. Or, impossible que le vent ne le touche quand il est dans un état de pierre... C'est pour cela qu'il ne pouvait pas s'empêcher de souffrir quand il se détransformait. Et c'était surtout pour cela qu'il s'entrainait à endurer cette souffrance. Cette souffrance insupportable, que sa collègue aussi devait connaître, vu son état de tension... Car il était possible qu'un de ses élèves se retrouve coincé l'année dernière sans que personne ne sache comment l'en délivrer.

"En tout cas, j'ai beau aussi détester ce genre de métamorphose... J'essaie de la pratiquer aussi souvent que possible. Non pas par masochisme, mais pour m'habituer. Et ne faire qu'un avec la Terre, pour me sentir de plus en plus proche d'elle, qu'elle soit aussi proche de moi que le vent. Je sais que peu de gens peuvent s'allier avec plus d'un élément, cela m'a pris beaucoup de temps avant que la terre ne m'accepte à moitié. Donc, cela doit être dur pour vous de gérer un accident de pétrification d'un de vos élèves, si la terre et vous n'êtes pas proches. Dans ce cas là, appelez moi, je saurai tout de suite comment le soulager de son état sans mal. Et gratuitement, si j'ai un de vos beaux sourires en échange..."

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Gabrielle continuait à passer faiblement la sphère aquatique sur le visage de Ryugi, comme un geste continuel, un automate. C'était en partie pour se calmer qu'elle exécutait cette mécanique, mais aussi principalement pour rafraichir son collègue, qui semblait en avoir grand besoin.
Toujours à quatre pattes, sa respiration était assez rapide. Elle se calma au fur et à mesure. Il n'avait pas exécuté une transformation totale. Oui, Gaby savait très bien ce que cela donnait de voir quelqu'un qui ne faisait réellement qu'un avec la Terre -cela semblait logique pour une professeur à Verto … -, mais cela n'était pas si différent physiquement que ce qu'avait montré Ryugi. Non, en fait, cela était même presque semblable. Malheureusement, la douleur accompagnait encore sa métamorphose.
En cet instant, Gabrielle Nivis traitait son collègue comme un élève : rafraichissement, encouragements, et autres signes de sympathie pour aider l'autre à se sentir en confiance. Elle s'en rendit compte, et cela l'amusa légèrement. Pourquoi ce comportement, alors que l'homme était lui aussi un professeur, et qu'il s'y connaissait forcément très bien en magie élémentaire ?
Gaby n'approfondit pas la question. Car une seconde lui vint automatiquement : elle allait sourire longtemps, comme cela, comme une parfait idiote ? Non, il ne fallait pas non plus incommoder le jeune homme. Alors elle cessa de faire fonctionner les muscles de sa bouche, et cessa de sourire.
Ryugi semblait aller mieux. Il se redressa en grinçant des dents, mais se redressa quand même. La jeune femme se leva à son tour. La sphère perdit sa forme si parfaite. C'était comme si une aiguille avait percé un ballon d'Eau. Le liquide s'en échappa. Mais avant de toucher le sol, il se volatilisait et se fondait dans l'Air.

Pétrification. Ce mot lui faisait des frissons dans le dos, et lui faisait dresser les cheveux sur la tête. En temps que professeur, elle l'utilisait souvent, mais elle avait toujours un petit blocage dessus. Elle inspira profondément. Son visage était redevenu de marbre, et son regard doux faisait le tour des traits du visage de Ryugi - il fallait bien faire quelque chose de ces yeux violets ! .
Elle comprenait tout à fait l'homme quand il parlait d'être seul avec l'Elément. C'était presque un moment … intime.
Lui aussi détestait souffrir. Et pourtant il persévérait jusqu'à réussir. Jusqu'à ce que la douleur s'estompe enfin, pour de bon. Il avait une perception intéressante des choses.
« si j'ai un de vos beaux sourires en échange.. . ». Cette phrase résonna dans ta tête. Et voilà, elle avait une fois de trop souris. Mais Gabrielle Nivis se pencha sur la sujet principale, et préféra ne pas répondre à cette dernière phrase.

« Je serai très heureuse de faire certains de mes cours avec vous, pour éviter ce genres de petits incidents. On trouve rarement des élèves très doués. L'année dernière, j'enseignais à un jeune homme qui s'était avéré avoir un réel don pour communiquer avec la Terre. Il ne pouvait pas se fondre totalement avec l'Elément, mais y arrivait avec certaines parties de son corps, et ce, sans souffrir énormément. »

Une pensée lui traversa l'esprit : pourquoi racontait-elle cela ?

« B... Bref. Je suis contente de voir que vous vous remettez aussi vite de mes émotions, car il s'agit d'un réel effort physique, ce que vous venez de faire ! Hmm ... Et si vous avez également besoin de mon aide lors de vos cours, n'hésitez pas à me contacter. »

Dis donc, elle parlait pas mal, aujourd'hui, notre chère Gaby. Elle qui n'était pas de nature bavarde, la voilà devenue un vrai moulin à paroles !

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C'était quand même dommage. Ryugi trouvait que cette demoiselle avait un sourire très charmant, mais elle arrêta assez vite de sourire comme cela, pensant surement à autre chose. Peut être ne voulait-elle pas embêter Ryugi à ne rien faire d'autre que de sourire en l'essuyant, mais cela ne le dérangeait pas le moins du monde, au contraire. C'était le genre de garçon à apprécier ce genre de sourire, car cela prouvait un certain rapprochement, qu'il ne connaissait pas vraiment avant. C'était peut être une forme, un début d'amitié qui naissait entre ces deux professeurs. Sauf que ce que Ryugi ne savait pas, et qu'il ne pouvait pas savoir, était un mot magique qui avait changé deux trois choses. Pétrification. C'était sans vraiment se rendre compte un mot qui semblait déranger cette demoiselle. Il était facile pour un élémentaliste aérien de sentir la respiration de toute personne, mais aussi son rythme, et à l'écoute de ce mot, cela semblait provoquer un changement assez brusque dans l'état de la jeune dame. Peut être avait-elle un problème lié à ce mot, peut être avait-elle eu un traumatisme causé par des pétrifications quand elle était plus jeune, Ryugi ne le savait pas et ne voulait pas le savoir. Ce qui fit qu'il pouvait converser encore pendant des heures sur les théories élémentalistes, mais il préféra s'en arrêter au plus vite possible avec une touche d'humour. Quoque ce n'était pas tellement de l'humour mais un réel souhait. Ryugi adorait voir les gens sourire, surtout s'il s'agissait de demoiselles. Et cela avait tout de suite eu l'effet escompté : Sa collègue ne put s'empêcher de sourire, que ce soit à cause de lui ou pour lui, Ryugi ne le savait pas. En tout cas, cela l'avait mis aussi mal à l'aise et elle préféra retourner sur le sujet.

C'est vrai qu'à deux, les cours seraient normalement bien plus réussis que chacun dans son coin. Car en effet, Ryugi était persuadé que des cours communs apporteraient bien plus aux élèves mais aussi à lui même, sur les méthodes d'enseignement. Il fallait rappeler que Ryugi n'avait aucune expérience professorale, et qu'il n'avait de sur que ce qu'il avait appris seul donc avoir un peu de théorie supplémentaire ne lui serait pas de refus, même s'il savait déja les bases. Sauf que ses bases ne sont pas celles académiques... Mais bon, comme d'habitude, il se débrouillerait, il s'est déja fait posséder par un élément et s'en est sorti vivant. C'était déja ça. Et un détail qui frappa alors Ryugi comme cela, c'était qu'elle était soudainement plus proche qu'avant la pétrification de Ryugi. Peut être était-ce un déclic? En tout cas, elle lui parlait bien plus qu'avant. Ryugi avait peut être réussi à découvrir une des facettes de la personnalité qu'elle voulait cacher, mais au moins, il arrivait maintenant à la faire sourire et parler. C'était un bon début, dans la percée de ce secret... De ce secret qui dépassait même son imagination.

"Ce sera avec plaisir que nos groupes travaillent ensemble. Mais je ne vais pas vous contacter à chaque fois que j'ai un souci... Sinon, vous ne pourriez plus travailler tranquillement. Et puis... Est ce que je pourrais vous tutoyer? Une familiarité peut être, mais sur mon monde natal, tout le monde a l'habitude de se tutoyer, donc... Ca me fait un peu bizarre de parler comme cela."

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Gabrielle Nivis Christmas se passa pour la énième fois la main dans les cheveux. Elle calma directement sa respiration. Ryugi pouvait sentir la gêne de la jeune femme grâce à la régularité de son souffle, en se servant de sa grande maîtrise de l'Air. Gaby se détendit. Son regard qui fuyait toujours devint automatiquement plus doux, plus tendre, et donc plus sensible aux moindres détails. Et notre chère professeur en redécouvrit un qui l'avait fait frissonné la première fois qu'elle l'avait vu : le bandeau qui cachait un œil de son nouveau collègue. Pourquoi ? Pourquoi fallait-il que Gabrielle retrouvât toujours des petites choses sans importances qui lui faisait tant rappeler ce Nykola, ce frère adoptif, ce garçon dénué de la moindre intelligence, ce barbare, cette brute qui avait pillé son cœur et le peu de stabilité qui lui restait à l'époque ? Si elle n'avait pas fait attention au rythme régulier de sa respiration, elle aurait soupiré. Oui, un long et douloureux soupir qui aurait déchiré ce léger silence.
Rien qu'en repensant à sa dispute, rien qu'en repensant au bandeau noir de son frère, une grande tristesse l'envahit. Débilité. Pur et simple débilité qu'était son frère. Dans cette histoire, jamais elle n'avait eu tort. Ou du moins, elle refusait de le reconnaître.

Ryugi, avec son air sympathique, lui demandé, assez gêné, si les deux nouveaux collègues pouvaient se tutoyer. Pourquoi cette question semblait tant l'embarrasser ? Ah, il n'avait pas l'habitude de vouvoyer. Cette petite phrase amusa doucement Gabrielle. Elle qui avait toujours pour coutume d'utiliser 'vous' plutôt que 'tu'. Mais pourquoi pas, après tout ? La jeune professeur avait bien d'autres collègues, et une petite familiarisation ne serait pas de refus, surtout avec un homme aussi gentil, et qui, de plus, exerçait une profession semblable à la sienne.
Sans compter qu'ils risquaient de se voir souvent à cause (ou plutôt, grâce) à leurs métiers pratiquement similaires.
Autant accepter avec politesse. Un sourire agréable parcourut ses lèvres, et ne les quitta pas. Gaby se sentait désormais bien. Le moindre souvenir de son frère avait quitté sa tête. Son visage de marbre était légèrement illuminé grâce à ce petit sourire.

« Évidemment, Ryugi. Cela ne me pose pas de problèmes. »

Nouveau sourire. Comme pour lui dire 'ne t'en fais pas, je ne vais pas temanger'. En compagnie de l'homme, elle se sentait bien, elle avait carrément envie de déballer sa vie, de … rigoler.
Cette étrange sensation … Jamais elle ne l'avait ressentit … Hormis avec Nykola, et sa mère adoptive. Voilà pourquoi elle souriait de la sorte.
Son regard continuait de fixer le visage de son collègue, sans pour autant se planter dans ses yeux. De cette manière, il n'y avait aucun dangers possibles.
Que Gabrielle Nivis pouvait-elle dire ? De quoi pouvait-elle parler ? C'était la première fois qu'elle se posait ce genre de questions, et pourtant, elle en posait des questions, notre jolie jeune femme !
Mais oui, voilà, une question …

« Dis-moi, Ryugi, apprécies-tu la musique ? »

Interrogation bête et simple. Mais pour une femme ayant reçu le même don que Mozart dès sa plus tendre enfance, elle devait bien sur la poser aux gens de son entourage. Et en l'occurrence, Gaby ressentait le besoin de savoir si le nouveau professeur à Verto savait apprécier les petits plaisirs que la vie offrait.

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Boum boum, Ryugi sentait son coeur battre. C'était à son tour d'avoir la respiration qui s'accélérait, le coeur qui battait plus vite et plus fort. Il ne savait pas pourquoi, il sentait l'air de ses poumons le parcourir en long, en large et en travers, à une vitesse folle. Mais qu'est ce que c'était que cela? Ryugi se souvenait uniquement d'avoir pu ressentir une telle sensation en présence de la seule personne qu'il avait réussi à sauver de sa folie destructrice. Et ben... C'était vraiment quelque chose qu'il n'appréciait pas trop, un tel affolement malgré lui que l'air par contraction de ses poumons lui permettait une immobilisation. Voila, il s'était calmé, en même temps que Gabrielle d'ailleurs. La seule chose qu'il voulait, c'était cette réponse. Positive ou négative, ce qui lui comptait, c'était la réponse. Bien sur, si c'est positif, ce sera bien meilleur pour l'esprit de Ryugi, mais il attendait juste cette réponse qui finit par arriver. Oui. Et même accompagné d'un sourire. Et là, le coeur de Ryugi se remit à battre plus vite. Nouvelle immobilisation aérienne. Le cerveau de Ryugi commanda alors à son coeur de se calmer; s'il ne voulait pas que son coeur soit changé en pierre. Ce qui le calma net.

C'était quand même drôle, cette sensation. Cette ressemblance avec la seule elfe que Ryugi appréciait. Mis à part le regard fuyant et les oreilles pas pointues, Gabrielle ressemblait quand même pas mal à cette personne, que Ryugi avait tenté d'oublier comme le reste de son monde. Ryugi voulait la connaître, chercher à savoir ce que son coeur contenait, et si possible à pouvoir y accéder. Une personne qui était, malgré le formatage, la seule personne de toute cette planète qui aimait bien s'occuper de son harmonie sonore, dans un enchainement de sons qu'elle appelait musique. Chose dont Ryugi se fichait royalement à cause de ce formatage, mais il avait appris à s'y intéresser. Il avait appris à savoir ce qui produisait des sons comme elle aimait, mais il n'avait pas vraiment l'oreille réceptive. Et c'est à ce moment que Gabrielle lui avait posé cette question. Si c'était une elfe, Ryugi aurait cru à une blague. Mais non.

"Hmmm... Drôle de question. A vrai dire... Je ne l'apprécie pas tellement. Elle me rend indifférent, sans me bouger, que ce soit un bel accord ou pas. Mais c'est mon éducation qui veut cela, pour que ce qui ne vit pas ne puisse pas me toucher. On disait que les différents hymnes pouvaient soulever une population à la guerre, peut être était-ce la raison pour laquelle les elfes d'Espéranto sont indifférents à la musique."

Mais tout en parlant, Ryugi essayait de se souvenir des leçons de musique que son amie avait voulu lui inculquer, avec des mélodies, des partitions, dont une où Ryugi devait apprendre par coeur afin de l'aider. Sifflant à la terre, une tablette de pierre s'éleva du sol, mesurant peut être deux mètres, avant de se percer seule de trous assez irréguliers, mais dans un ordre assez précis que Ryugi avait fait. Il se concentrait, au millimètre près, et lorsque les trous atteignirent le bout de la tablette, un vent commençait à souffler au niveau du sol et vers l'ouest, dans un seul trou, avant de monter peu à peu. Faisant entendre une certaine mélodie, assez jolie, mais qui ne provoqua aucune émotion chez Ryugi. Même la plus merveilleuse des musiques ne pouvait pas toucher le coeur d'un elfe comprimé... Cela n'empêchait pas cette musique d'être belle.

"Mais bon, j'ai beau ne pas ressentir les émotions que les musiques dégagent... Cela ne veut pas dire que je n'y connais rien. Même si je suis plutot novice en la matière, je sais ce qui plait et ce qui fait mal aux oreilles."

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